Emploi théologique et exégétique de l’Écriture
Ellen White utilisait la Bible dans un objectif pastoral, mais elle ne voulait pas uniquement édifier, exhorter et reprendre. Elle n’avait pas seulement une approche pratique de la Bible, elle la citait aussi pour justifier certaines doctrines et clarifier des questions relatives à la foi.DDP 374.2
Les lecteurs attentifs des écrits d’Ellen White notent la pertinence dont elle fait preuve lorsqu’elle cite les textes bibliques, le faisant de façon tout à fait conforme au texte original en hébreu ou en grec. Bien qu’elle n’ait jamais étudié ces deux langues, elle fit des remarques d’ordre théologique tout à fait perspicaces concernant le sens des textes bibliques originaux. Ellen White proposait des commentaires très intéressants du texte biblique, mais elle ne commenta pas et n’interpréta pas tous les textes de l’Écriture. Elle ne se considérait pas comme un exégète ou un interprète de la Bible, donnant l’impression que l’étude personnelle ne serait pas nécessaire. Pourtant, ses remarques étaient toujours pertinentes d’un point de vue théologique.DDP 374.3
Il est important de faire un usage théologique de la Bible quand des idées ou des thèmes bibliques majeurs sont évoqués sans citation biblique spécifique. Il a été dit que «interpréter un texte de façon théologique signifie réfléchir aux implications de ce texte dans le contexte théologique plus large de l’Écriture. Le texte n’est pas abordé uniquement dans son contexte littéraire et historique mais également dans le contexte de la révélation divine dans son ensemble».DDP 375.1
La façon dont elle aborda le texte de Jean 5.39 est un exemple de sa capacité à utiliser l’Écriture de façon théologique et exégétique. La version King James de la Bible emploie un impératif : Sondez les Écritures, parce que, vous, vouspensez avoir en elles la vie éternelle ; or ce sont elles-mêmes qui me rendent témoignage. [libre traduction] Le grec ɛpɑuvâtɛ (ereunate) peut être un impératif présent ou un indicatif présent ; le contexte semble aller dans le sens d’un indicatif : Vous sondez les Écritures parce que, vous, vous pensez avoir en elles la vie éternelle ; or ce sont elles-mêmes qui me rendent témoignage. (Nouvelle Bible Segond) Pfandl souligne que «de nombreux Juifs croyaient que le fait de connaître la loi était une garantie pour la vie éternelle. Mais Jésus leur rappelle que les Écritures dans lesquelles ils pensaient trouver la vie éternelle étaient les écrits qui rendaient témoignage de lui». Ellen White utilisait souvent le verset de Jean 5.39 pour encourager l’étude de la Bible, mais elle était également consciente de sa signification exégétique. Dans Desire of Ages [Jésus-Christ], elle relate la situation telle qu’elle est décrite dans Jean et utilise la version Revised Version au lieu de la King James pour mettre l’accent sur le sens exégétique : Vous sondez les Écritures parce que, vous, vous pensez avoir en elles la vie éternelle ; or ce sont elles-mêmes qui me rendent témoignage. [Nouvelle Bible Segond, proche du texte en anglais] Cela montre aussi qu’Ellen White n’utilisait pas une seule version de la Bible et qu’elle tenait compte du message du texte original.DDP 375.2
Ellen White démontra sa capacité à adopter une approche théologique de l’Écriture en associant parfois certains concepts bibliques pour exprimer des idées bibliques avec des termes sortis de leur contexte d’origine mais correspondant au contexte biblique de l’action salvatrice de Dieu.DDP 376.1
Par exemple, dans la Bible la notion de baptême du Saint-Esprit n’est mentionnée que sept fois dans le Nouveau Testament, et toujours avec cette construction de phrase : «baptiser de l’Esprit saint» (Marc 1.8; Matthieu 3.11 ; Luc 3.16; Jean 1.33; Actes 1.5; 11.15,16; 1 Corinthiens 12.13), même si d’autres passages font référence à cette idée de façon différente. Dans le Nouveau Testament, le baptême du Saint-Esprit semble faire référence à l’effusion qui fut accordée aux disciples le jour de le Pentecôte et qui leur permit de commencer à remplir la mission que Jésus leur avait confiée. Il semble aussi être associé au baptême d’eau du croyant. Au-delà de ce baptême initial du Saint-Esprit, le croyant est encouragé à se laisser remplir du Saint-Esprit (Éphésiens 5.18). Même si Ellen White fait aussi référence au baptême du Saint-Esprit qui eut lieu à la Pentecôte et semble être d’accord avec l’idée que le baptême d’eau et le baptême de l’Esprit sont associés, elle emploie fréquemment l’expression «baptiser avec le Saint-Esprit» pour mettre l’accent sur la nécessité pour les croyants de s’engager pleinement avec Dieu et d’être remplis et fortifiés par le Saint-Esprit afin de pouvoir accomplir leur tâche et se laisser transformer à l’image du Christ. Pour Ellen White, le fait d’être rempli du Saint-Esprit et celui d’être baptisé du Saint-Esprit produisent les mêmes effets. Ainsi, pour elle il peut y avoir un «baptême de l’Esprit plus complet», ou un «plus grand baptême de l’Esprit», ou «un nouveau baptême de l’Esprit chaque jour» comme le recevait Jésus et comme nous devrions le recevoir aussi. Ellen White semble associer le concept biblique du baptême du Saint-Esprit et l’idée d’être rempli du Saint-Esprit. Elle utilise l’expression «baptême du Saint-Esprit» pour décrire quelque chose qui, bibliquement, correspond plus à l’idée d’être rempli de l’Esprit.DDP 376.2
D’après les exemples donnés ci-dessus, il apparaît clairement qu’Ellen White utilisait l’Écriture d’une manière plus large que strictement exégétique. En fait, il semble que «son rôle le plus caractéristique était celui d’un évangéliste - pas celui d’un exégète ni d’un théologien, mais d’un prédicateur et d’un évangéliste. [...] Elle était prophète et elle exhortait plus qu’elle n’était exégète.» Elle utilisait donc parfois le même passage biblique de différentes façons. Il est donc important d’étudier avec attention la manière dont elle utilisait un passage particulier. Il serait inapproprié de considérer chaque déclaration qu’elle fit au sujet d’un texte donné comme l’interprétation unique de ce passage, en négligeant d’étudier le texte par nous-mêmes.DDP 377.1